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Houle sentimentale, une histoire normande du surf

Dans les années 1970, le surf débarque sur la côte ouest du Cotentin. Le matériel de l’époque réserve la pratique aux mordus. Un demi-siècle plus tard, le surf devenu populaire, le Cotentin s’affiche comme la nouvelle Californie, parfois aux antipodes de l’attitude contemplative et libertaire des pionniers.

article publié en intégralité sur Grand-Format.


Au Cotentin Surf Club, à Siouville (Manche), une photo en noir et blanc attire l’attention des visiteurs : celle d’un homme qui pose avec une planche de surf sur la plage de Sciotot, à cinq kilomètres de là. Qui est-il ? D’après Guillaume, l’entraîneur qui tient le blog du club, il s’agirait de la première documentation d’un surfeur en Normandie : un certain Pierre Poncet, sur une photo datant de 1964. « Mais les informations ne sont pas vérifiées », reconnaît-il. Alors, lorsque Grand-Format a contacté le seul Pierre Poncet qui réside encore en Normandie, et dont l’âge (77 ans) pourrait correspondre à celui de l’homme sur la photo, l’intéressé répond qu’il n’a jamais pratiqué le surf et qu’il n’a même jamais entendu parler d’un homonyme dans la région… Grand-Format est donc remonté, génération après génération, jusqu’à ceux qui se considèrent comme les pionniers du surf dans l’Ouest-Cotentin.


Le 11 juin 2022, en début d’après-midi, le soleil frappait fort sur le sable de Siouville, tandis que les embruns s’élevaient en nuages sous le vent de sud-ouest. Des conditions idéales pour organiser le Siouville Surf Open, qui ne s’était pas tenu depuis deux ans pour cause de pandémie. Plus de 80 personnes, jeunes et moins jeunes, ont ainsi pu gratuitement s’initier au surf. Sous les yeux des curieux et des professionnels, les jeunes espoirs du club ont également profité des vagues lors d’une démonstration finalement ponctuée par la « Daron Surf Contest », la compétition entre les « vieux » du club. À en croire la foule sur la plage, sur les stands et à la buvette, le doute n’est plus permis : la Normandie, elle aussi, peut se targuer d’être une terre de surf.


Des pionniers normands qui continuent de marquer les esprits


Dans le monde de ce sport de glisse, ce ne sont pas les côtes normandes qui sont les plus réputées en France. Et pourtant, c’est bien dans les eaux de la Manche que s’est installé le surf en Europe pour la première fois. Dans les années 1920 à Jersey, les garde-côtes australiens débarquaient en été, laissant l’hiver chez eux dans l’hémisphère Sud. Pourtant, côté français, c’est plutôt vers Biarritz que les premières vagues françaises ont été domptées, bien plus tard, dans les années 1950. Premiers clubs et ébauches de compétitions y voient le jour dès les années 1960 avant que la Fédération Française de Surf (FFS) y soit créée en 1964.


Mais tous les témoignages abondent dans le même sens : ce ne sont que plusieurs années plus tard, dans les années 1970, que les côtes normandes ont accueilli leurs premiers surfeurs avérés, en particulier sur la côte ouest du Cotentin. Une décennie après la première mention de 1964 et du mystérieux Pierre Poncet, quelques rares passionnés sont ainsi devenus les pionniers du surf normand. Patrick Lhuillery est l’un d’eux. A l’évocation de ses premières sessions, ce Cherbourgeois de 67 ans se voit encore en 1976 à l’arrière d’une moto BMW verte que conduisait son pote Serge Chaulieu. Il tenait bien fermement la planche de surf qu’ils venaient tous les deux de « choper quelque part parce qu’elle trainait là ». Patrick avait alors 21 ans, « le surf n’existait pas encore dans la région » et c’est la première fois que le futur féru de glisse se tenait debout sur une planche.


C’est la recherche du frisson qui animait les amateurs de sensations iodées, quelles que soient les conditions et le matériel à disposition.

Plus tard se sont greffés au binôme Pierre Marrec, dit « La Mouette », ainsi que le beau-frère de Patrick, Serge Renard. Eux quatre sont finalement parvenus à imposer leurs noms dans les esprits des surfeurs du coin comme étant les pionniers du surf normand « et d’une superbe aventure humaine ». Leur réputation demeure solide, malgré les comportements parfois « peu chaleureux » de Chaulieu. « Quand on était sur l’eau, il faisait le ménage », explique Patrick. Le nouveau ou le Parisien n’avait qu’à bien se tenir s’il ne voulait pas être refoulé des vagues.


Thierry Pinel est un de ces curieux. Il a commencé à surfer en 1986, à l’affût de la moindre tempête pour aller se « faire secouer par les vagues », se souvient-il, la moustache souriante et joueuse, conscient du danger qu’il courait alors. A cette époque, la culture du surf et les écoles n’étaient pas encore implantées dans la région, et c’est la recherche du frisson qui animait les amateurs de sensations iodées, quelles que soient les conditions et le matériel à disposition. Outre les combinaisons lourdes et les planches inadaptées, « on n’utilisait que des magazines, avec des photos qui ne représentent pas du tout les vagues normandes », rappelle Thierry Pinel. « On n’avait pas les vidéos et les tutos qu’on peut avoir aujourd’hui ». L’homme se rappelle par ailleurs la difficulté d’intégration par ces surfeurs parfois « très localistes et pas très accueillants ». « Il fallait faire ses preuves », assure-t-il.


[...]

Un article à retrouver gratuitement et en intégralité sur le site de Grand-Format, en trois chapitres :



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